Bertille chante… à distance

Premier album de Bertille, Distances (*) décline sur des mélodies raffinées, des variations sur le thème de l’éloignement plus ou moins contraint. Un univers musical épuré en apparence, mais fort travaillé par une musicienne multi-instrumentiste passée par la case classique.

Pas de haussement de ton dans Distances, mais un mariage des mots et des notes qui racontent le féminin sur le mode de l’intime en dix titres, et une reprise électro pop – elle n’est pas native de Sète pour rien – de Dans l’eau de la claire fontaine, ce classique signé Brassens.

Ces distances choisies ou imposées renvoient à la série de photographies éponymes de l’artiste photographe Cahuate Milk qui a signé la photo d’illustration, la scénographie pour le live, et certains de ses clips. Un artiste plasticien, basé à Montpellier, qui travaille beaucoup sur le masque et le masqué pour questionner les différents aspects de la vie en société et une forme de « normalité ».

Après une introduction où l’on sent la formation classique de la musicienne, Dans tes yeux donne le ton avec une description des paysages évoqués par un corps aimé et qui est loin. Ensuite, Bertille surfe sur différentes émotions, parfois de façon plus vibrante, comme dans Boussole, aux accents plus rap, ou plus mélancolique comme dans la chanson finale aux sonorités plus folks, J’aimerais être où elle évoque joliment son rêve d’être « Une brève de printemps« .

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Louis Arlette ou la musique des mots

Quatrième album pour Louis Arlette, Chrysalide surprend par ses compositions électro mises au service de récits déglingués où les jeux de mots n’ont rien de gratuit. Une belle surprise.

Après Sourire carnivore(2018), Des Ruines et des Poèmes (2019) et Arbre de vie (2021), Louis Arlette change de braquet avec Chrysalide, un disque marqué du sceau de l’originalité où il marie, avec un talent certain, les mots, leurs sons à ceux de mélodies enlevées. Entre slam et musique électro, l’artiste – riche d’une solide formation classique et qui est aussi à l’aise au clavier qu’au violoncelle – nous convie à un voyage en neuf étapes en forme de description d’un homme en marge de son temps qui sort de son isolement à la façon dont .

Dans ces textes, il convie des figures antiques (Dis-donc, Énée, Sardanapale) à des séquences plus contemporaines (Le Cafard et les sashimis, Samsung enragé). C’est à la suite d’un coup de blues que l’artiste a fait un repli sur lui-même pour signer ses compositions d’une grande richesse. Et se replonger dans l’exercice solitaire et rédempteur de l’écriture.

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Camille Bénâtre sans dommages

Camille Bénâtre a pris le temps pour composer Dommage. Plus de trois ans ont passé depuis la sortie de Après le soir. Douze chansons plutôt pop électronique en forme d’observations sur le monde qui l’entoure.

Jouant sur le double sens du mot « dommage », Camille Bénâtre est de retour avec un disque(*) qui s’inscrit dans une veine pop et les mélodies anglo-saxonne portant sa voix douce, douée pour un certain murmure. Il a mis en boite le disque depuis 2020 entre Toulouse et Göteborg en Suède (évoquée dans le clip de Dans ta direction) dans une réalisation artisanale. Au hasard des chansons, il a fait appel à des partenaires de jeu : ainsi Louise Bénâtre joue de la batterie du trois titres ou encore Stéphan Bertholio assure la partie de scie musicale sur Stupidémocratie.

Côté inspiration, l’artiste explore, sans hausser le ton, bien des thèmes. Ainsi, sur un rythme de valse électronique, il évoque la douleur d’une rupture et d’une relation nocive dans L’Ombre de moi : « J’ai troqué ma peine contre un moment de césure/ Je ne suis plus à l’ombre de toi/ L’ombre de moi. » La Suède lui a inspiré Sans terre et sans roi, ou comment on peut vivre dans une terre incognita – « Messager d’un autre temps/ Fou d’un autre divan. » – chanson dans laquelle on entend l’extrait d’un poème de Edith Södergran, Le pays qui n’existe pas.

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Armelle Yons livre ses secrets…

Avec un univers sonore qui chasse large – de la chanson « classique » au rock – Armelle Yons signe un premier album, Mon secret, ambitieux et parfois déroutant.

Mon secret (*), c’est en treize chansons, la carte de visite sonore de Armelle Yons qui, après avoir interprété les classiques de la chanson française, se met à nue avec ses textes mis en musique par le duo de la Bestiole, formé par Delphine et Olivier, rencontrés lors d’un concert hommage à Jacques Higelin. D’emblée, cet opus peut dérouter, tant l’artiste y a mis toutes ses influences, tous ses coups de cœur aussi, ce qui créé un univers qui peut sembler partir dans tous les sens.

De l’univers de cabaret de la chanson-titre, qui fait écho à la photo de la pochette, où elle évoque « Des vitreux, des Soulages éphémères« , aux sonorités latines évoquant les errances nocturnes et citadines (Tango Padadam) à une ballade comme Les Clés du temps, en passant par une reprise un brin électrisée d’un classique de Barbara, Du bout des lèvres.

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Des chansons pour tourner la page

Juste avant de basculer dans le nouveau millésime, un petit tour de certaines chansons qui ont marqué les ondes cette année, parfois parce que leur créateur est « parti » vers d’autres rivages. Musiques !

Christina Rosmini : Le Temps qui passe

Arno : La Vérité

La Caravane passe : T’as la touche Manouche

Lavilliers : La Bandiera rossa

Jane Birkin : Medley


Une chanson de paix en cinq langues (Français, Ukrainien, Arabe, Hébreu, Langue des signes)

Juliette : J’aime pas la chanson

Michel Buhler : En Palestine

Graeme Allwright et Maxime Leforestier : Suzanne

En souvenir de Juliette

Chanson française

C’est avec une ferveur certaine que Claire Elzière rend hommage à la muse de St Germain des Prés avec N’oubliez pas Gréco (*). Elle revisite quelques classiques et d’autres chansons moins connues.

Claire Elzière fait partie de la nouvelle génération des interprètes. Avec N’oubliez pas Gréco, elle s’attaque au répertoire de celle qui chanta Jean-Paul Sartre comme Boris Vian et Prévert; Jacques Brel, comme Léo Ferré -entre autres- et qui nous a quittés en septembre 2020. Dans le livret accompagnant ce disque, Dominique Cravic, le directeur artistique du projet et arrangeur en compagnie du pianiste Grégory Veux, raconte comment, il y a quelques années, Julliette Gréco avait accueilli Claire Elzière à sa descente de scène alors qu’elle venait de chanter, À la belle étoile, de Prévert et Kosma, en lui lançant : « C’est comme ça qu’il faut chanter ! » Un mince compliment qui a dû pousser aujourd’hui la chanteuse à signer cet hommage qui se termine par une belle chanson inédite donnant son titre à l’ensemble, où elle lance : « J’entends encore sa voix neuve/ Dans les rues qui vont au fleuve/ Où s’enivrait l’après-guerre/ Entre Danton et Garancière. »

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Hymnes décalés à la vie

Pour son retour en piste, Eddy La Gooyatsh revient avec une Faim du tigre, un album de chansons aux couleurs musicales variées et qui sonnent comme autant de récits offrant une vision optimiste de l’existence.

Eddy La Gooyatsh n’est pas du genre à cultiver un parcours rectiligne. Autodidacte après quelques détours par les écoles de jazz, guitariste, auteur et compositeur, il a d’abord accompagné les autres sur scène (Chet, Camille…) avant de se lancer en solo en 2006 avec L’Amour et l’Eau fraiche, faire une pause du côté du livre-disque pour jeune public (M le méchant), ou encore se lancer dans une fable rétro et jazz en 2021 avec Eddy La Gooyatsh & le 2ème zoo olympique. C’est dire que La Faim du Tigre marque son grand retour à une chanson plus « classique ».

En dix chansons, l’artiste propose musicalement un univers folk/pop avec quelques couleurs afro-cubaines de belle facture, lui-même jouant de plusieurs instruments, et une belle variété d’ukulélés notamment (La Balançoire).

Il ouvre le bal par Croire en mieux, un hymne en forme de célébration d’une poésie salvatrice qui n’a pas besoin de croire au ciel pour donner des raisons de survivre. « J‘entends des voix, mais pas des sermons/ c’est des poèmes, c’est juste pour moi./ Y a des lueurs qui vagabondent/ qui me racontent que tout ne va pas si mal. » Et qui aime prendre de la hauteur face aux soucis du quotidien : « Et la terre, bye bue, je t’aime plus trop/ En bas tu danses mal, t’es plus belle d’en haut. »(La Balançoire). Pour présenter ce cinquième album, l’artiste dit simplement : « Je voulais qu’il soit simple, authentique, chaud et léger. »

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La pop de combat de Gervaise

En six chansons, Gervaise signe dans son nouvel EP, Chair tendre (*) des hymnes à la modernité et à la liberté des femmes. Une voix douce au service de combats intimes, mais qui peuvent résonner en chacun de nous.

Entre atmosphère électrique, façon dance-floor, et ballades sensuelles (Quand j’enlève tout), Gervaise donne de sa voix – qui taquine les aigus – pour s’affirmer en chanteuse et femme de caractère. En guise de préambule, elle a publié durant l’été son interpellation à Sabrina en revisitant son tube Boys, boys, boys à sa manière et lui lance : « Je t’aime comme ça/ Mais je n’aime pas les clichés. »

Jouant aussi bien sur les sons très marqués par une pop des années 80 que sur les visuels, Gervaise signe avec Chair tendre un EP où elle se dévoile, laissant aussi bien deviner ses forces que ses blessures, ses rêves aussi, passant d’une atmosphère électrique et électro (J’le fais et Sad&Seul) à des ballades mélancoliques (Vendeur de roses). Dès la chanson d’ouverture, elle annonce la couleur et joue sur une sensualité assumée : « J’en ai des chromosomes/ Des x et des y/ Des Lancomes, des déesses, des dieux grecs/ Des ogives, des axiomes, des putains, des paillettes/ J’le fais et toi/ Faudra qu’tu fasses avec ! »

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Frédéric Bobin : les pieds sur terre

Album célébrant le retour vers la lumière, Que tout renaisse (*) permet à Frédéric Bobin de confirme ses talents de folk singer français qui, lsans renier ceux qui l’ont influencé, creuse en douceur son sillon. Un album apaisant aux arrangements ciselés.

Chez les Bobin, le travail artisanal se fait en famille. Si Philippe signe, comme à l’accoutumée, les textes, Frédéric glisse ses mélodies sur ses vers, donne de la voix et peaufine les arrangements une bonne année. Avec Que tout renaisse, Frédéric Bobin marie l’univers folk made in France avec des chœurs – Buridane fait une belle apparition dans la chanson titre et accompagne cinq autres chansons de l’album – des parenthèses rock ou un clavier mélancolique, tenu par Julien Limonne, pour le onzième titre du disque, Le Fou du village, en forme d’appel à une nouvelle vie, loin de nos mondes hyperconnectés. Il chante : « Quitter les villes tentaculaires/ Mégalopoles carnassières/ Marquer une pause/ S’éloigner des marchands du temple/ Qu’on a érigés en exemples/ Et qui implosent.« 

Comme ses grands « anciens » auxquels il peut rendre ouvertement hommage (dans la belle chanson Leonard et Marianne (So long), inspiré de la belle lettre d’adieu de Cohen à sa muse, en 2016), Frédéric Bobin peut aussi bien passer d’une veine personnelle, de l’évocation de retrouvailles amoureuses (La route est longue) ou des années insouciantes et folles de la fac (Terminus campus) à un regard plus concerné par les futilités du paraître et de la course au pouvoir (Comme on est venu; J’ignorais que j’avais des ailes), la recherche de racines et le retour à une vie plus en phase avec la Nature (Que tout renaisse ou encore, de manière plus poétique, La Vallée).

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Les chants du monde de Christina Rosmini

Le nouvel album de Christina Rosmini, Inti (*), célèbre de façon subtile la puissance créatrice féminine. L’écrin sonore de ses textes est aussi varié que raffiné. Un disque qui a du style.

Il y a des disques qui vous embarquent dès la première écoute. Nouvel opus de l’auteure-compositrice marseillaise Christina Rosmini, Inti est de ceux-là. Et ils sont rares. Placé sous le signe d’Inti, Dieu du soleil amérindien, ce disque est un hymne aux voyages, aux rencontres, aux femmes et aux métissages. Dans le livret, l’artiste souligne : « Plus largement, cet opus est une sorte « d’album photos-musical » de tous les pays où j’ai voyagé, chanté, aimé, croisé des gens exceptionnels et vécu des expériences fondatrices. » Les voyages forgent, dit-on, la jeunesse, il nourrit aussi une large inspiration à l’image de cet Inti. Elle a concocté ce nouvel album en posant son sac dans le Midi. Elle raconte : « Après avoir composé et enregistré les bases de ce qui deviendrait cet album, je me suis enfermée, seule, un long mois, au Village de Vacances Léo Lagrange de Vaison-la-Romaine, pour écrire jour et nuit et choisir mes mots un à un, avec passion et attention.

Dès le premier titre, La Louve, conçu près des montagnes québécoises, Christina Rosmini célèbre la nature sauvage qui s’exprime sous forme de la puissance créatrice, tapie au fond de nous. « Mais elle sera cruelle/ Bientôt te dévorera/ Si jamais tu la muselles/ La Louve qui hurle en toi. »

Jouant sur les mélodies qui sont nourries aussi bien de sonorités hispaniques que mélodies venues du Mexique, de la rumba chère à Cuba ou encore du tango argentin, Christina Rosmini sait passer du personnel – et le souvenir d’un premier amour (Le Kid), d’une rupture (Mais pourquoi ?) – à l’universel, elle qui prend fait et cause par exemple pour défendre les peuples d’Amazonie (Rouge).

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